Dans l’esprit de la plupart des Français, la fonction de Président de la République revêt un certain prestige et s’accompagne tout naturellement d’une certaine solennité lui conférant une grande dignité. Sous les présidences du général de Gaulle et de Georges Pompidou, on n’a pas souvenir d’un quelconque incident y ayant porté atteinte. Ou au moins, les personnes concernées ont tant fait pour la préserver que rien n’en a filtré. Au demeurant, les médias n’auraient pas osé faire naître la moindre rumeur.
Après son échec à l’élection de 1981, Valéry Giscard d’Estaing, sortant de l’Elysée à pied avait subi sans broncher les sifflets de jeunes écervelés qui confondaient confrontation démocratique et guerre civile. Là aussi, son attitude restée digne avait préservé le prestige de la fonction.
Et François Mitterrand élu en 1981 avait su lui aussi rester impassible devant les vociférations des excités haineux qui refusaient l’échec en hurlant : « Mitterrand t ‘es foutu, les giscardiens sont dans la rue ». Aux éructations convulsives des nervis, il avait opposé son masque de sphinx, laissant l’opprobre retomber sur les agités. De même, parmi tous les médias, nul n’a pu diffuser la moindre nouvelle concernant sa double vie.
Et on raconte que sous la présidence de Jacques Chirac, un quidam l’ayant publiquement traité de « connard », le président aurait répliqué : « Et moi Chirac ». L’à-propos ne manquait ni d'humour, ni de panache. Et la fonction présidentielle s’en est trouvée dignement préservée.
Or depuis, rupture promise, rupture réalisée. On est passé des déboires sentimentaux présidentiels multiples et variés à la lune de miel sur papier glacé, du « descends ici un peu » au « casse-toi pauv’ con » et tout récemment au « Fais pas le malin, toi » répété trois fois à Chambery.
Pour parfaire le tableau, Madame chante à nouveau sur les tréteaux et songe à jouer dans un film de Woody Allen. Que pourrait-il arriver si dans l’assistance, et en présence du président, des mécontents de la prestation s’avisent de siffler l’artiste ? Naguère, dans une principauté que certains qualifiaient alors d’opérette, l’ancienne actrice devenue l’épouse du Prince avait totalement renoncé à sa carrière pourtant autrement talentueuse.
De la sorte donc, non seulement la fonction présidentielle est totalement désacralisée, ce qui somme toute n’est pas un si grand mal, mais elle a tout autant perdu toute solennité, ce qui est d’un grand dommage. Le président de la république symbolise toute la France et son histoire. Le général de Gaulle avait su par cette voie nous donner le sentiment de la grandeur. Il nous en restait un certain relent. Nous avons désormais l’impression d’en vivre les derniers soubresauts et de manière quelque peu grotesque.