Vos papiers!

Je suis né à l’époque coloniale au Tonkin dans ce qui était l’Indochine Française de parents français nés eux aussi en Indochine. Mon grand-père paternel était français né en Corse de parents français à Penta di Casinca, et mon grand-père maternel né français de parents français dans le Doubs à Mouthe.

Mon père était fonctionnaire de l’administration française en Indochine.

Par la suite, les évènements que l’on sait ont changé l’Indochine en trois pays indépendants : Vietnam, Laos et Cambodge. Je me suis donc trouvé de ce fait né à l’étranger.

J’ai ensuite été appelé à effectuer mon service militaire en Algérie sans qu’on exige de moi de prouver que j’étais français. Cela seul aurait dû selon la loi me conférer automatiquement la nationalité française, fussé-je zoulou ou inuit de naissance. Puis j’ai été fonctionnaire titulaire de l’éducation nationale durant 37 ans et demi.

Au moment  de faire valoir mes droits à la retraite, mon administration a alors exigé que je prouve ma nationalité française. Et comme du fait de l’indépendance du Vietnam mes parents se trouvaient eux aussi nés à l’étranger, j’ai dû aussi fournir la preuve de leur nationalité française. Et cerise sur le gâteau, comme le nom de mon grand-père paternel fleurait trop un parfum transalpin, il m’a fallu prouver que lui aussi était bien français.

Et comme ma carte d’identité datait de dix ans, j’ai dû affronter deux fois les mêmes affres administratives.

A l’époque, j’avais écrit au ministre de l’Education Nationale, au ministre de l’Intérieur, au Procureur de la République et au député de ma circonscription pour tenter d’écourter ce qui fut un véritable parcours du combattant. Silence radio sur toute la ligne. J’ai dû patienter pendant plus de six mois tout en affrontant ces multiples tracasseries administratives jusqu’à ce qu’enfin les pièces officielles exigées me soient délivrées. Et dire que nous (nous ? moi aussi ? Est-ce encore si sûr) sommes un pays cartésien.